Le cahier de brouillon est un outil primordial pour l’apprentissage de l’écriture. Il accompagne les élèves de la maternelle jusqu’à l’université. Il accompagne même les grands auteurs de la littérature française, comme le montre l’exposition virtuelle de la BNF sur les brouillons d’écrivains. Souvent considéré comme du contenu peu important, il contient pourtant toute la réflexion de l’élève et donc tout son processus d’écriture. Plus important encore, c’est un espace d’exercice à l’écriture, dans lequel les erreurs sont admises. L’enfant est libre de raturer, de se tromper. C’est le meilleur outil pour constater le processus d’écriture des élèves et leurs progrès. Pourtant, le cahier de brouillon a pendant longtemps été considéré comme un simple outil de “recopie”, ce qui est problématique. Comment l’utiliser pour qu’il fasse progresser au mieux nos élèves ? On vous explique tout dans cet article.
Préparer l’enfant à rédiger grâce au cahier de brouillon
Passer par le brouillon
Maîtriser le sujet sur lequel on écrit facilite l’activité de production. L’activité d’écriture peut donc demander, dans un premier temps, des activités préparatoires qui améliorent la qualité des textes produits.
Elles peuvent prendre différentes formes :
- une recherche d’informations, une réflexion collective pour trouver des idées (pour une fiction) ;
- des notes préparatoires ; un travail sur le lexique à mobiliser ; un schéma, un dessin…
Pourquoi ne pas rassembler toutes les notes sur la table ou sous forme d’un grand tableau de recherches ?
Pour les enfants, les modifications d’un brouillon sont coûteuses. Commencer par une phase de travail sous une autre forme que le texte (schéma, tableau, dessin…) pourrait donc permettre de structurer et d’explorer avant d’écrire. Vous pouvez également proposer une phrase d’amorce comme nous le faisons chez Plume. Cet effet d’amorçage est souvent très « débloquant » pour les enfants qui, en réalité, ont juste besoin de se lancer.
À propos de l’utilisation du brouillon en classe
À l’école, nous sommes nombreux à avoir expérimenté l’usage du cahier de brouillon qui permet d’écrire plus ou moins librement le premier jet d’une rédaction. Dans ce cahier de brouillon ou cahier d’essai, de nombreux élèves s’essaient à la rédaction, souvent de façon linéaire, avant de recopier avec application, « au propre ». Il s’agit là d’un objet scolaire institutionnalisé.
Malheureusement, l’usage du brouillon aboutit souvent à une simple recopie ou mise au propre et ne permet pas aux élèves d’améliorer leur production. Cette mise en œuvre de la production écrite qui se pratique plus qu’elle ne s’enseigne conditionne grandement la manière dont les élèves s’y prennent pour produire ce type d’écrit scolaire : écriture d’un premier jet puis copie au propre (Billon, 2012).
On voit comme cette vision du brouillon est en décalage avec ce que devrait être la production d’un texte : réfléchir, anticiper, faire une pause, lire, revenir à son texte, le remanier… Comme le soulignent Bernadette Kervyn et Jérôme Faux¹, « les travaux des psychologues cognitivistes (Goult, 1980 ; Scardamalia & Bereiter, 1986) montrent que la planification, en tant que réflexion préparatoire et opération qui se poursuit tout au long de l’écriture (notamment au moment des pauses ou arrêts du geste graphique ou moteur) peut couvrir jusqu’à deux tiers du temps de la production et détermine grandement le texte et le processus de production ».
Pourquoi le brouillon ?
L’enseignement de stratégies d’utilisation du brouillon est bénéfique pour les élèves.
- Une utilisation pertinente du brouillon permet de délester les élèves d’une partie de la tâche au moment de la production finale, et ainsi de se concentrer plus efficacement sur l’orthographe.
- Il conduit à une amélioration finale de la qualité des textes produits.
Il nous faut donc penser un enseignement de la stratégie du brouillon : qu’est-ce qu’un brouillon, à quoi sert-il ? Il s’agit à la fois d’enseigner comment on planifie la production de texte, mais également d’observer des modèles de brouillon.
Les stratégies d’utilisation du brouillon
Petya Ivanova-Fournier rappelle dans son étude² les deux types de brouillon décrits par Alcorta (2001) :
- Le brouillon linéaire : il ne présente que peu de différences avec le texte final. Il est entièrement rédigé et peut faire l’objet de quelques modifications et corrections. C’est la façon traditionnelle d’envisager le brouillon.
- Le brouillon instrumental : c’est un brouillon qui présente les structures écrites. On y trouve des groupes de mots, des listes, des tableaux, des flèches, des numéros et des symboles de toutes les sortes. Cela peut être par exemple des cartes mentales, des dessins, etc.
Le brouillon instrumental permet en effet de construire la pensée et de mettre en place des stratégies d’écriture dont nous avons pu parler plus tôt.
Les deux types de brouillon n’ont pas les mêmes fonctions et n’agissent pas au même niveau du processus d’écriture.
- Le brouillon linéaire améliore la communication. Il est plutôt présent chez les jeunes enfants (avant 12 ou 13 ans).
- Le brouillon instrumental a pour vocation de communiquer avec soi-même. Il se trouve davantage en amont du processus d’écriture. Il permet de planifier.
On comprend ainsi qu’il n’est nul besoin de chercher à ce que le brouillon de votre enfant soit au plus proche de l’écrit final, car cela reviendrait à gommer toute la fonction du brouillon lui-même. Les moments de construction de l’écrit (les fameux « écrits intermédiaires » tels qu’ils sont nommés dans les textes institutionnels) sont donc tout autant à valoriser que les écrits finaux.
Accompagner la préparation du brouillon
Le travail effectué, du brouillon au texte final, ne s’accomplit pas d’un seul mouvement, mais de façons successives ou interrompues par des pauses d’écriture et des retours sur le « déjà écrit ».
Voici un déroulement que pouvez suivre avec vos élèves, en gardant à l’esprit que les enfants de primaire adopteront plus systématiquement un brouillon linéaire :
- Rédaction du premier jet.
- Mise en texte. Le texte peut être oralisé de sorte que des éléments d’amélioration viendront à l’esprit de l’enfant. L’oralisation aidera à prendre conscience des effets de lecture produits par chaque texte. D’ailleurs c’est dans cet état d’esprit que nous permettons aux enfants sur Plume d’écouter leurs textes. Cela peut également être très intéressant pour l’enfant d’enregistrer son texte. Lorsqu’il a des idées, vous pouvez le laisser les dicter afin qu’il puisse les réécouter plus tard.
- Évaluation du premier jet. Le texte est confronté à la liste des critères (grille d’évaluation de l’enseignant) pour guider l’amélioration du premier jet.
- Finalisation : vos élèves vont retravailler leur texte. Il peut y avoir une ou plusieurs réécritures successives, qui vont amener à une rédaction finale.
En tout état de cause, le plus important est que votre enfant saisisse la nécessité de préparer son écrit. Qu’il assimile que son écrit, comme sa pensée, sont en construction.
Avec Plume, l’étape du brouillon peut se faire :
- directement sur Plume : auquel cas l’enseignant pourra ensuite faire des demandes de modification à ses élèves ;
- sur des éditables : toutes les histoires Plume peuvent en effet être imprimées pour travailler l’écriture à la main. L’éditable peut donc aussi servir pour un premier jet.
Nous espérons que cet article vous aura aidé sur l’usage qui peut être fait du brouillon. Ces articles pourraient également vous intéresser :
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- Le témoignage de Pierre, qui utilise Plume avec sa classe de CE1
- Le témoignage de Stéphanie, qui utilise Plume avec sa classe de CE1-CE2.
Notes :
- Kervyn, Bernadette. (2021) La préparation de l’écriture : vers un concept didactique à forte pertinence. Pratiques. DOI: 10.4000/pratiques.10259
- Petya Ivanova-Fournier rappelle dans son étude les deux types de brouillon décrits par Alcorta (2001) :
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